mercredi 10 septembre 2008

L'ethnologue martien




Je vais m’efforcer, de mémoire, de ne pas trahir les propos de Lévi-Strauss tirés de son ouvrage Tristes tropiques. Fut un temps, on reconnaissait la supériorité des sociétés occidentales au fait qu’elles formaient et envoyaient par delà les continents, des armées d’anthropologues et d’ethnologues. Voilà l’idée sur laquelle je veux revenir dans ce texte. La suite n’est que pure fiction personnelle…

Il y avait les chercheurs et les analysés. Ces disciplines qui ont atteint leurs lettres de noblesse avant la fin de l’ère des colonisations officielles, ont développé un vocabulaire qui se veut le plus neutre et le plus scientifique possible. La recherche d’une reconnaissance en tant que discipline distinct et respectable passe souvent par cette étape. L’économie avait dû elle aussi réussir ce rite de passage à l’âge adulte. Cette prétendue neutralité, entendons absence de jugement de valeurs, donne parfois l’impression d’avoir à faire à un médecin légiste penché sur son cadavre. L’effet est d’autant plus fort que le cadavre en question était et est encore colonisé. Je me propose donc, sur le ton de l’humour de rédiger le rapport de mission sur la planète terre ou d’imaginer les notes qu’aurait pu prendre un ethnologue martien en faisant ressortir, à travers un certain vocabulaire et un angle d’analyse totalement martien, on s’en doute, un sentiment qui me met souvent mal à l’aise lorsque dans certains projets de coopération internationale, on traite des particularités des populations ciblées, en recourant à ce vocabulaire pseudo scientifique.


* Note de début de compte rendu : Je me suis efforcé non par exotisme mais par souci de respect de mon sujet d’analyse de faire traduire mes notes prises en ÓÔŋË , à savoir la langue du sud de notre planète Mars, en l’un des dialectes rencontré dans une tribut particulièrement intéressante. L’étude de l’ensemble des organisations sociales de ce satellite de Mars m’est apparue plus complexe que prévu, je me suis donc attardé uniquement sur un groupe qui vit dans une zone qu’ils nomment la France. Comme je m’étais attaché les services d’un membre du groupe, particulièrement talentueux pour se défendre lors des joutes verbales avec ses congénères, je m’aperçu qu’avec beaucoup de patience de ma part je pourrai lui enseigner notre langue. C’est à lui aujourd’hui, après ces années d’étude, que je laisse la charge de traduire en annexe de mon travail, l’ensemble de mes notes. Je travaille à ce jour sur une méthode de compréhension de leurs moyens de communication plus vulgarisé qui satisfera éventuellement la curiosité d’autres chercheurs.

Je n’éditerai pas toutes les notes prises pour ce travail de recherche. Mais sous la forme d’une chronique intitulée : « A la découverte de l’humanerie », j’en divulguerai certains passages.

L’humanerie dans son ensemble se compose de groupes sociaux ayant des fonctions et des pouvoirs bien définis. Des mécanismes inconscients sont mis en place et relativement respectés, à l’échelle du groupe étudié, qui comprend presque 60 millions de membres, pour faire perdurer un équilibre relatif. Concernant ce constat nous pourrions généraliser les conclusions à l’ensemble de l’humanerie. Mais dans un souci de respect des règles de recherche nous nous en tiendrons au groupe initialement ciblé. Les classifications sont multiples, horizontales et verticales, relativement complexes. Les français, comme ils se nomment et nous reviendrons sur cette auto-appellation, font l’expérience de ces règles de conduite au cours du premier tiers de leur vie. Ils n’auront d’ailleurs véritablement un rôle au sein du groupe qu’une fois ce temps écoulé et l’ensemble des règles strictement reconnues et intériorisées. La nature a su s’adapter à leur mode de vie. En seulement quelques centaines de millier d’années leurs comportements sociétaux ont forcé l’ordre divin des choses à se plier à certaines de leurs pratiques. C’était d’ailleurs en partant de ce premier constat et des craintes qu’il suscitait en moi, que j’avais choisi mon sujet d’étude sur ce satellite de Mars. Revenons à ces pratiques. L’humanerie peut se diviser en deux groupes. D’un côté les femmes, à qui il revient notamment de concevoir les jeunes, de l’autre les hommes qui n’ont qu’un rôle mineur tant dans la procréation que dans l’élevage des rejetons. La nature, j’y reviens produit un peu plus de femmes que d’hommes à la naissance. D’une part, un certain nombre d’entres elles succombent lors de l’accouchement. Mais d’autre part, historiquement les femmes ont subi plusieurs formes de génocide telles les chasses dites « aux sorcières ». De plus elles sont dans une proportion non négligeable mortellement victimes de comportements de l’autre groupe. Ce que nous pourrions appeler sur Mars un fait injuste, est compensé par un système de gestion des lois, quasiment contrôlé par le groupe des hommes. Majoritairement, ils votent les lois, jugent et les appliquent. De façon général, le groupe des hommes est plus puissant, les mécanismes de société ayant été construit par eux. Leurs marabouts sont des hommes, leur dieu est un homme, les artisans de leur système, qu’ils soient scientifiques ou intellectuels, le sont tout autant. On observe majoritairement, encore au temps de mon étude, qu’à la tête de ce qu’ils appellent État, sorte de machine assurant l’immobilisme social, tant en nombre qu’en influence, que les hommes y étaient beaucoup plus représentés. Ils se sont assurés qu’on utilise majoritaire les dénominations masculines dans le langage de la France. En fait, tout comme dans la société les membres de ce groupe ont divisé le langage en deux, en s’accordant sur une supériorité du genre masculin. A travers une autre petite recherche, j’ai pu constater qu’on ne retrouvait pas nécessairement l’expression de l’ascendant de ce groupe à travers le langage dans d’autres sociétés de l’humanerie. Dans des dialectes dits anglais par exemple, ce découpage n’existe pas.
Je vais conclure ce texte, en espérant pouvoir continuer à vous faire découvrir ce sous-groupe de l’humanerie, lors du prochain tirage de ce journal.

dimanche 13 juillet 2008

Voyage aux mille sens


Le voyage de sa personne dans un monde étranger c’est avant tout le voyage de ses cinq sens. Et rapidement on réalise que la culture dans laquelle nous vivons en permanence nous a transmis quelques autres sens peut être moins physiques mais qu’on apprend à découvrir dans le voyage.

L’ouïe.
Les pédo-linguistes nous disent pouvoir reconnaître dans les gazouillements des nourrissons, lors de l’analyse des amplitudes notamment les signes précurseurs des langues dans lesquelles ils sont en train de grandir. Les sonorités répétées, propre à nos cultures nous sembleront vite familières et l’inspiration musicale des artistes s’en nourrira et renforcera encore ces habitudes. Rappelons nous comment les « r » espagnol, ou arabe, ou wolof nous ont surpris les premières fois. A quel point nous n’avons pas su comment accueillir ces musiques asiatiques jouées sur un instrument proche du violon? Combien nous nous pensions incapable de reproduire aux chants ces changements de gammes des pays d’Afrique du Nord. Là s’arrêtera mes remarques, n’étant pas musiciens et n’ayant pas les connaissances de la musique pour en parler.
Après viennent s’ajouter les sens, les sensations, les codes culturelles me semblent-il, qui viennent multiplier les sollicitations à l’adaptation des sens habituellement reconnus. Les sphères du publique et du privé en sont un exemple. J’en fais actuellement l’expérience. D’où l’idée nocturne de ce texte. Il est 1h49 du matin. Je vis sur l’île de Saint-Louis au Sénégal. Depuis 49 minutes, me semble-t-il, des chans religieux ont commencé à plusieurs emplacements de l’île. On peut réaliser, quand on a un peu de temps pour y penser, ce qui m’arrive en ce moment ne pouvant dormir, que le son, ou plutôt le volume musical est culturel. Les hauts parleurs sont à la limite de leur capacité. La distorsion ne semble pas importuner celles et ceux qui participent à ces chants, il me semble même que plus le volume est fort et plus le chanteur doit donner l’impression d’être pieux. Et certaines personnes sont particulièrement croyantes ce soir. On m’a raconté assez rapidement, je ne me m’étendrai donc pas sur le sujet, qu’un responsable politique de la ville avait voulu réglementer, si ce n’est le volume au moins les heures de ces chants religieux. Il fut soit remplacé soit invité à aller pratiquer son art de la gestion de la chose publique dans une autre région du Sénégal. Ce qui m’amène à identifier que dans ma culture occidentale d’origine, la nuit appartient à la sphère privée tandis que le jour est plus ouvert à la sphère publique. La nuit c’est le repos de chacun, c’est le couvre feu pour ce qu’on appelle le bruit. Après 11h00 si le voisin continue à mettre sa musique aussi forte on appelle les flics. Vous conviendrez avec moi que le concept de bruit devient alors très culturel. Ici, les voisins ne viendront pas se plaindre.
Je me rappelle maintenant, puisque je continue à avoir du temps, de ce trajet en autobus entre les villes de Bobodioulaso au Burkina Faso et la ville de Ségou au Mali. Pendant un trajet allongé par quelques aléas aux frontières, nous avions, avec une amie avec qui je voyageais, pu faire l’expérience de chants religieux pendant presque 10 heures sans interruption. La chaleur élevée accentuée par l’état de l’autobus sans climatisation mais avec les vitres qu’on ne pouvait pas ouvrir, mêlée à ces chants d’un conducteur agressif sur la route mais lui aussi particulièrement croyants ce jour là, nous avait fait vivre une expérience auditive mémorable. Bien sûr, je n’ai rien contre ces chants religieux, mais je souligne les différences qu’il m’est donné d’identifier par rapport à ma culture d’origine, grâce au voyage. Cela me permet d’ailleurs de mieux comprendre les traits et les conventions de ma propre culture.
Et les exemples me semblent infinis. Il y a ces langues qu’on entend comme une musique chantante mais incompréhensible. Il y a les habitudes liées à l’utilisation du klaxon dont j’avais pu faire la première expérience à Istanbul. J’en étais venu à me demander si la fonction du klaxon était bien d’alerter ou bien de saluer chaque conducteur des autres véhicules, comme un code de politesse inconnu. Il y a ces personnes qui parlent fortement dans le métro de Montréal. Cela semble tellement inhabituel aux autres passagers qu’ils se retournent et rapidement imaginent ou réalisent à l’accent qu’il s’agit de touristes français. Ici au Sénégal, il y a ces chants d’enfants, ces cris pendant les combats de lutte qu’ils tentent de reproduire en dessous de votre fenêtre, dans la rue, après les avoir suivi à la télévision. Il y a ces bêlements de moutons et de chèvres qui résonnent pendant votre petit déjeuner ou lorsque vous vous brossez les dents, vous donnant l’impression d’être chez vous un berger dans les montagnes d’Irlande. Il y a bien sûr l’appel à la mosquée du muezzin qui transmet ses premières invitations à la prière avant 5h00 et dont quelques personnes étrangères au pays éprouvent des difficultés à apprivoiser. Ce n’est heureusement pas mon cas. Il y a ces marchands et ces marchandes qui vous crient la joie qu’ils ont de vous offrir la promotion du mois, de l’année dis-je. Il y a des personnes assises, placées à des endroits dont la stratégie du lieu me laisse souvent perplexes. Elles demandent de l’argent, sollicitent la charité qui est d’ailleurs l’un des cinq piliers de l’Islam, en clamant grâce à un haut parleur parfois tout en vous faisant sursauter au moment où vous êtes à leur hauteur, une louange à dieu, me semble-t-il. Je retrouve souvent l’un entre eux sur le pont qui relie l’île au continent. Peut être prie-t-il pour nous, pour nous souhaiter une bonne traversée, dans les meilleurs conditions, pour réduire le risque d’effondrement d’un pont qui ne m’inspire d’ailleurs pas vraiment confiance. S’il s’agit de cela, je m’engage pour la prochaine fois à lui donner quelques pièces. Il y a les claquements de ces fers à cheval de ces calèches qui sillonnent les rues de la ville. Il y a le bruit des volets et des portes qui s’ouvrent et se ferment brouillement réveillés par les vents annonçant la pluie imminente. Il y a les bruits inconnus de mon ventre se plaignant et me reprochant d’avoir succombé à ma dernière curiosité culinaire.
Comme je l’écrivais les exemples sont infinis, ressortent tous en même temps lors des premiers temps dans un nouveau pays, provoquant parfois l’étourdissement dans la compréhension des codes entourant l’ouïe. Avec le temps, tout cela nous semble plus familier, mais quelques fois comme maintenant pour moi, les décalages réapparaissent et c’est toute une réflexion que j’ai le temps de mener et de partager.
Il est 2h50, Saint-Louis ne s’éveille pas, puisqu’elle ne s’est pas endormie. La chanson de Dutronc est hors contexte. Mais j’ai toujours sommeil.

mercredi 9 juillet 2008

Un autre discours par les frères Azoumé


Comme je le répète, il m’importe, avec cette série de passages du livre des frères Azoumé que je m’apprête à vous livrer, de mettre à votre disposition un discours qui contraste avec des visions romantiques et complaisantes de l’Afrique, très souvent véhiculées. Il m’importe également de donner un espace à des intellectuels africains sur la situation de leur propre continent pour faire contrepoids à ces travaux d’intellectuels occidentaux qui ne sont pas placés au mieux, vous en conviendrez, pour en parler. L’histoire étant encore très fraîche.

(Hazoumé, Alain et Edgard, Afrique, un avenir en sursis, Paris, l’Harmattan 1988,
Prologue)

« Le chaos est-il si imminent, le gouffre si captivant, que nous n’osons, malgré la lucidité supposée que procure l’âge adulte, le regarder en face. La chute redoutée en sera d’autant plus inéluctable. Cet aveuglement concourt à une manière d’exorcisme, un rituel incantatoire dont le rapport avec notre imagerie traditionnelle est criant. Décidemment en filigrane de cette Afrique aux mille néons, celle des agences de tourisme et des conférences internationales ne cesse de se profiler l’autre Afrique, qu’on croyait définitivement figée sur les cartes postales et dans les manuels d’ethnologie. Savoir comment l’Occident accrût ses capacités techniques, propulsant l’homme dans l’espace, recréant l’environnement avec des images et des sons, réalisant ce que nos dieux les plus puissants étaient incapable de faire de nos rêves les plus échevelés est une interrogation majeure que nous ne nous posons pas.
Omission volontaire, mémoire sélective? Il y a longtemps que nous avons abandonné tout esprit de compétition, toute volonté de rattrapage. D’ailleurs rattrape-t-on son aîné? L’échelle du temps est implacable. Si l’on interrompait à cet instant la fulgurante évolution du monde occidental, il est probable, en prenant pour postulat la permanence des types de comportements actuels, que l’Afrique noire ne l’aurait toujours point rejoint au troisième millénaire. L’état de développement technico-culturel que connaît l’Occident n’est pas le fruit d’une accumulation mécanique de recettes savamment épicées. Il faut une mouvance rendant l’homme curieux, assoiffé de connaissances, assailli d’interrogations, sans jamais être lassé de se remettre en question, et de structurer son action.
Toutes les civilisations se valent tant qu’elles en sont ignorées. Lorsqu’elles se rencontrent, la comparaison n’est jamais flatteuse pour la plus faible et de toute manière la domination est au bout, si elle ne sait relever le défi ».

Pénuriz



Ce que les fonctionnaires ne peuvent dire sans risquer leur carrière dit-on, ce que les coopérants ne peuvent dire sans risquer l’ingérence dit-on, certains journalistes commencent à l’évoquer de façon très candide sans identifier véritablement ni les raisons réelles ni les perspectives à court et moyen termes.

Voici deux articles qui peuvent en laisser quelques uns pour le moins songeur. Certains diront que c’était prévisible depuis le début de l’année. D’autres, que rien n’indique qu’une amélioration à court terme est envisageable…

Les ménages dans la tourmente

http://www.sudonline.sn/spip.php?article12365

A Quelle pénurie se fier ?
Gaz, eau, riz, essence, électricité…

http://www.sudonline.sn/spip.php?article12366

lundi 7 juillet 2008

Hazoumé, Alain et Edgard, Afrique, un avenir en sursis, Paris, l’Harmattan 1988


Il ne serait pas honnête de ne pas évoquer tous les chemins de réflexions et les lectures que je parcours pour mieux comprendre mon environnement actuel et pour cerner mes utilités potentielles.
Pour cela, je dois lire les critiques formulées par certains intellectuels africains sur leur propre continent. Il me semble que ces discours mettent souvent mal à l’aise les populations du continent mais aussi les populations occidentales. Ce malaise me semble révélateur mais surtout pas suffisant pour que je décide de ne pas présenter dans les prochaines semaines quelques passages du livre, Afrique, un avenir en sursis, des frères Hazoumé.
Chacun doit balayer devant sa porte en premier lieu, dit le dicton populaire. Ce livre est exemplaire à ce niveau. Peut être cela nous permettra-t-il d’amorcer notre propre travail d’autocritique, en insistant sur la nécessité de nous débarrasser des visions romantiques et impérialistes à propos de l’Afrique qui nous furent transmises tant par notre éducation académique que par nos éducations familiale et sociétale.
Pour aujourd’hui, je vous laisse avec une partie de la préface que Jean Ziegler, rapporteur spécial pour le droit à l'alimentation du Conseil des droits de l’homme de l'Organisation des Nations Unies de 2000 à 2008, a rédigée pour ce livre.

« Paul Valéry raconte l’étrange et troublante histoire d’un arbre qui pousse en Inde et ne porte des fruits que sous l’orage. Alain et Edgard Hazoumé ressemblent à cet arbre : leur livre puissant, écrit dans une langue de colère et de beauté, est le fruit du dépit. Ils accusent : l’Afrique, mendiante, assise sur un tas d’or, est elle-même l’artisan de sa propre déchéance. Alain et Edgard Hazoumé savent de quoi ils parlent. Ils ont le droit de parler comme ils parlent. Leur mère est congolaise, leur père béninois. Avocat, économiste, ils n’utilisent pas leur situation de privilège pour tourner le dos à leurs peuples, pour oublier qui sur le continent exercent l’empire d’un pouvoir financier, culturel, politique quasi absolu.
J’ai rarement lu un libre qui soit aussi dur, si accusateur pour l’Afrique contemporaine. Ni d’ailleurs si bien, si passionnément écrit. Comme tout grand livre, celui-ci est le fruit d’une aventure personnelle, non d’une spéculation conceptuelle. Ce livre est une thérapie, un exorcisme…Écoutons : « Qui ne se souvient du jeune enfant qu’il fut, lorsqu’arrivée en « métropole », il dut apporter une réponse aux questions pressentes de ses petits camarades… » Questions qui sentaient bon la conviction et les préjugés colonialistes des parents. Car ces petits camarades posaient évidemment les questions, faisaient les remarques qui n’étaient que les échos des conversations entendues à la table familiale. Eux et nous. Très rapidement les frères Hazoumé ont dû choisir leur camp. Et c’est ce choix précoce qui donne aujourd’hui à leur argumentation cette force, cette crédibilité, cette conviction qui emporte presque irrésistiblement l’adhésion du lecteur et balaie ces pages comme une tornade. »

samedi 5 juillet 2008

Passages du livre « Tristes tropiques » de Claude Lévi-strauss

« Mais le problème demeure : comment l’ethnographe peut-il se tirer de la contradiction qui résulte des circonstances de son choix? Il a sous les yeux, il tient à sa disposition une société : la sienne; pourquoi décide-t-il de la dédaigner et de réserver à d’autres sociétés - choisies parmi les plus lointaines et les plus différentes - une patience et une dévotion que sa détermination refuse à ses concitoyens? Ce n’est pas un hasard que l’ethnographe ait rarement vis-à-vis de son propre groupe une attitude neutre. S’il est missionnaire ou administrateur, on peut en inférer qu’il a accepté de s’identifier à un ordre, au point de se consacrer à sa propagation; et quand il exerce sa profession sur le plan scientifique et universitaire, il y a de grandes chances pour qu’on puisse retrouver dans son passé des facteurs objectifs qui le montrent peu ou pas adapté à la société où il est né. En assumant le rôle, il a cherché soit un mode pratique de concilier son appartenance à un groupe et la réserve qu’il éprouve à son égard, soit, tout simplement, la manière de mettre à profit un état de détachement qui lui confère un avantage pour se rapprocher de sociétés différentes, à mi-chemin desquelles il se trouve déjà. »

« On n’échappe pas au dilemme : ou bien l’ethnographe adhère aux normes de son groupe, et les autres ne peuvent lui inspirer qu’une curiosité passagère dont la réprobation n’est jamais absente; ou bien il est capable de se livrer totalement à elles, et son objectivité reste viciée du fait qu’en le voulant ou non, pour se donner à toutes les sociétés il s’est au moins refusé à une. »

« L’opposition entre deux attitudes de l’ethnographe : critique à domicile et conformiste au-dehors, en recouvre donc une autre à laquelle il lui est encore plus difficile d’échapper. S’il veut contribuer à une amélioration de son régime social, il doit condamner, partout où elles existent, les conditions analogues à celles qu’il combat, et il perd son objectivité et son impartialité. En retour, le détachement que lui imposent le scrupule moral et la rigueur scientifique le prévient de critiquer sa propre société, étant donné qu’il ne veut en juger aucune afin de les connaître toutes. A agir chez soi, on se prive de comprendre le reste, mais à vouloir tout comprendre on renonce à rien changer. »

« On dit parfois que la société occidentale était la seule à avoir produit des ethnographes; que c’est là sa grandeur et, à défaut des autres supériorités que ceux-ci lui contestent, la seule qui les oblige à s’incliner devant elle puisque sans elle, ils n’existeraient pas. On pourrait aussi bien prétendre le contraire : si l’Occident a produit des ethnographes, c’est qu’un bien puissant remords devait le tourmenter, l’obligeant à confronter son image à celle de sociétés différentes dans l’espoir qu’elles réfléchiront les mêmes tares ou l’aideront à expliquer comment les siennes se sont développées dans son sein. »

mardi 6 mai 2008

"Les émeutes de la faim"

Émission radio sur France Inter avec Jean Ziegler, ancien rapport spécial des nations unies (Avril 2008).

Partie 1 :

http://www.dailymotion.com/relevance/search/ziegler/video/x56iqo_jean-ziegler-les-emeutes-de-la-faim_news

Partie 2 :

http://www.dailymotion.com/relevance/search/ziegler/video/x56irn_jean-ziegler-les-emeutes-de-la-faim_news

Aussi, un extrait du film "Bamako" du réalisateur Abderrahmane SISSAKO, 2006.

http://www.dailymotion.com/relevance/search/bamako/video/x2c1i6_bamako_politics

Rien à voir du tout du tout!
Je vous joins le rapport annuel 2007 de Monsanto. Augmentation du profit de 43% entre 2005 et 2007.
Moi j’hésite encore, mais quand je serai grand c’est dans un investissement comme celui là que j’aimerai que mon fond de retraite soit investi. Au fait, dans quelles entreprises votre fond de retraite est-il investi en ce moment?

http://www.monsanto.com/pdf/investors/supplemental_toolkit.pdf

lundi 5 mai 2008

La domination masculine

Se déraciner volontairement de sa société de naissance permet d’aller à la rencontre d’autres pratiques sociétales et culturelles. Cela permet, et on n’y pense pas toujours au départ, d’observer sous un autre angle sa société d’origine. Après, ressortent certaines différences et certaines constantes, comme celle qu’il m’intéresse de partager avec vous, à savoir la domination masculine.
C’est en se penchant sur les sociétés qui se posent en modèle qu’il est ensuite intéressant de décliner les observations vers celles qui ne se présentent pas ainsi. Par exemple, si le pays qui se présente comme la plus grande démocratie au monde présente des anomalies importantes dans le processus démocratique de ses élections présidentiels, qu’en est-il des autres pays que se gardent de se présenter ainsi? Quand le pays qui se présente comme celui des droits de l’homme présentent tant de discriminations sur son sol, force est de constater que le concept apparaît tout de suite plus relatif. Quand un pays se présente avec comme valeur fondamentale le principe d’égalité entre les hommes et les femmes et que des inégalités mesurables et observables persistent dans ses institutions, ses organisations et ses familles, on se dit qu’il est préférable de ne pas s’asseoir sur les résultats obtenus et de continuer de le décortiquer, de le débusquer et de mieux le comprendre.
Pour cela je ne m’improviserai pas sociologue, je vous propose d’écouter celui qui me parle le plus dans ce domaine :

http://www.dailymotion.com/relevance/search/bourdieu/video/x4vy0y_bourdieu-la-domination-masculine_news

Il m’apparaît donc que les hommes depuis le plus jeune âge capitalisent sur un héritage les favorisant. Ayant été élevé en garçon j’ai délimité la place qui m’était impartie dans une société qui octroie l’espace public en majorité au sexe masculin. Avec les années, il semble de plus en plus difficile donc de se mettre à la place des femmes, qui ont eu à composer, pour la plupart avec une éducation prédéterminée et féminine. Étant en dehors de ma culture, les résultats de mes observations sont plus apparents. Alors que dés le plus jeune âge les jeunes filles sont adjointes de cuisine et de travaux ménagers de leur mère au Sénégal, les jeunes garçons peuvent occuper leur enfance aux sports et aux jeux. Une fois que ce constat flagrant est établi, et ce n’est évidemment qu’un exemple parmi beaucoup d’autres, il m’est possible de chercher les clivages qui existent au sein d’autres sociétés. La place de la cuisine est toujours un espace féminisé en France par exemple, tandis qu’il est encore rare qu’un jeune garçon se fasse offrir une poupée pour son deuxième anniversaire au Québec. La parité salariale dans la fonction publique n’est que très récente dans ces deux nations, mais pas encore présente au sein des emplois dans le secteur privé. Les publicités sexistes sont omniprésentes et force est de constater que le nombre de femmes en politiques nationales est encore faible.

Je joins un texte important intitulé : « La libération des femmes : une exigence pour le futur » rédigé par Thomas Sankara, en mars 1987 lorsqu’il était à la tête du Burkina Faso. Son texte révolutionnaire ne peut que nous faire déplorer sa disparition forcée, tant il aurait des réflexions à apporter dans le combat que mènent aujourd’hui les femmes tant en Afrique qu’en Occident.

http://www.thomassankara.net/article.php3?id_article=0040

J’associe donc dans la lutte contre les inégalités dans les sociétés et entre les pays, celui des inégalités entre les femmes et les hommes.

samedi 3 mai 2008

Monsanto la chimique!

Après la lecture d’un entretien au journal Le Monde du nouveau rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à l’alimentaire, Olivier de Schutter, j’ai fait une petite recherche des débats sur la firme Monsanto qui sont disponibles sur internet.

Olivier de Schutter, rapporteur spécial de l'ONU sur le droit à l'alimentation
M. de Schutter prédit "la fin de la nourriture à bas prix". Il est le nouveau rapporteur depuis le 26 mars et a remplacé Jean Ziegler.
http://www.lemonde.fr/organisations-internationales/article/2008/05/02/m-de-schutter-predit-la-fin-de-la-nourriture-a-bas-prix_1040496_3220.html

Suit le documentaire intitulé "Le monde selon Monsanto" de la journaliste Marie-Monique Robin. 2008.

Part 1/7: http://www.dailymotion.com/relevance/search/%22le+monde+selon+monsanto%22/video/x50hev_le-monde-selon-monsanto-1sur7_news

Part 2/7: http://www.dailymotion.com/relevance/search/%22le+monde+selon+monsanto%22/video/x50hj4_le-monde-selon-monsanto-2sur7_news

Part 3/7: http://www.dailymotion.com/relevance/search/%22le+monde+selon+monsanto%22/video/x50hpx_le-monde-selon-monsanto-3sur7_news

Part 4/7: http://www.dailymotion.com/relevance/search/%22le+monde+selon+monsanto%22/video/x50hx4_le-monde-selon-monsanto-4sur7_news

Part 5/7: http://www.dailymotion.com/relevance/search/%22le+monde+selon+monsanto%22/video/x50me5_le-monde-selon-monsanto-5sur7_news

Part 6/7: le trouve pas...

Part 7/7: http://www.dailymotion.com/relevance/search/%22le+monde+selon+monsanto%22/video/x50n0j_le-monde-selon-monsanto-7sur7_news


Je joins également deux sites de Monsanto :

http://www.monsanto.com/

Et le site français de Monsanto :
http://www.monsanto.fr/

vendredi 2 mai 2008

La crise alimentaire mondiale

La crise alimentaire.
« Pour que le désespoir même se vende, il ne reste qu’à en trouver la formule. » Léo Ferré.

Comment en est-on arrivé là? En quoi consiste-t-elle exactement? Est-elle réelle, inventée, produite, stratégique…?
Des personnes compétentes tentent d’alerter la communauté mondiale depuis 1936, depuis 1983, depuis 2006, mais sans résultats tangibles. La prise de conscience doit se généraliser. La crise doit être comprise comme une étape prévisible et logique d’un système qui créait également des crises financières mondiales et maintient dans la situation de grande précarité un nombre grandissant de personnes pour se maintenir lui-même.
Nous sommes de plus un plus citoyen du monde et à ce titre nous avons maintenant des droits (très limités) et des devoirs. Se renseigner sur ce sujet fait parti de ces devoirs. Après, la nature ayant horreur du vide, si nous ne prenons pas individuellement l’espace politique qui est celui normalement occupé par un citoyen du monde, d’autres, déjà bien organisés, le prennent et se l’approprient.
Ma contribution aujourd’hui sera d’avancer quelques facteurs explicatifs.

La croissance démographique mondiale est réelle. Entre 2007 et 2025 la population mondiale augmentera de 20%. Si on met ce chiffre en parallèle avec la diminution constante des superficies de terres arables, on peut facilement en conclure qu’à rendement constant, la quantité de céréales par habitants ne cessera de diminuer, si de nouvelles mesures ne sont pas prises. La population urbaine est plus importante que la population rurale depuis 2007 à l’échelle de la planète. L’extension des villes a réduit des surfaces fertiles traditionnellement réservées à l’agriculture. Le phénomène de désertification et l’augmentation du niveau de la mer accentueront encore plus cette diminution des terres arables. Avec le phénomène d’urbanisation, on remarque que dans des pays à croissance économique forte, comme la Chine (taux de croissance économique à 2 chiffres depuis au moins 25 ans), les habitudes alimentaires changent. Dans ces pays le revenu des personnes qui quittent la campagne pour la ville, augmente s’ils trouvent un emploi. Les néo-urbains consomment plus de viande et de produits laitiers. A noter qu’il faut entre 10 à 15 kilos de céréales pour produire 1 kilo de bœuf, 3 kilos de céréales pour 1 kilo de poulet, cela explique la pression interne que vivent certains grands états producteurs céréaliers. A ce titre, la Chine est depuis peu importatrice de céréales. Les marchés mondiaux de céréales sont résiduels. Si on prend l’exemple du riz, ceux sont 30 millions de tonnes qui sont mis sur le marché international par année soit moins de 7% de la production mondiale. Ainsi, dés que des évènements viennent réduire la production d’un grand pays producteur l’offre en est réduite sur le marché international. Les pays qui sont en situation de déficit vivrier important, qui dépendent donc du marché international sont dans une situation de dépendance très forte. Une épée de Damoclès repose récolte après récolte au dessus de leurs têtes et au dessus, et c’est bien plus grave encore, de leurs populations.

Comprenons qu’une accumulation de facteurs conjoncturels et structurels ont provoqué cette situation.
Comprenons que l’augmentation du prix du pétrole, passant de 55 dollars US le baril à 119 dollars US au cours de la dernière année et demi, explique une partie de l’augmentation des prix des denrées de base. Pour des populations utilisant plus de 70% de leurs revenus pour l’alimentation (pour comparaison, on parle de 17% d revenu alloué pour l’alimentaire au Canada), l'augmentation des prix des produits alimentaires est dramatique. On ne peut pas évoquer l’évolution du marché du pétrole sans parler du marché financier mondial. Il semblerait que le marché céréalier intéresse « ces vautours impitoyables » de la finance mondiale (pour utiliser une expression de l’une de ces personnes s’afférant depuis de nombreuses années pour prévenir cette situation). Il semble que le marché céréalier est un marché refuge par rapport aux fluctuations moins prévisibles et extrêmement spéculatives du marché du pétrole. Aujourd'hui, qu'est ce qui empêche de faire un paquet de fric sur le marché international de l’alimentation? Pas grand chose. Il faut noter à ce titre que les prix d’une partie non négligeable des céréales mondiales sont négociés à la bourse de Chicago aux États-Unis. Avec la libéralisation des marchés agricoles les producteurs non pratiquement aucune influence sur les prix de leurs propres productions.

Notons que les changements climatiques et leurs conséquences expliquent une partie du phénomène. Lorsque l’Australie, l’un des cinq grands producteurs céréaliers au monde vit deux sécheresses majeures de suite, cela a nécessairement un impact sur le niveau des réserves mondiales de céréales qui est au plus bas depuis les vingt dernières années. Bien sûr les effets des changements climatiques sont bien plus étendus.
Ajouter un autre phénomène très intéressant, celui des biocarburants. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En 2007, c’est 5% des céréales produites qui ont rejoint les réservoirs de nos voitures plutôt que les estomacs des individus. On parle de 134 millions de tonnes de céréales qui furent transformées en biocarburant, majoritairement du maïs aux États-Unis (80 millions rien qu’aux États-Unis). Le Brésil a également produit 400 millions de tonnes de cannes à sucre pour la production de biodiesel. Les européens transforment majoritairement à partir du colza. C’est autant de produits agricoles qui n’ont pas rejoint le marché alimentaire. Les projections pour les 5 prochaines années sont alarmantes puisque des investissements dans le sens du développement de cette industrie sont mentionnés sur tous les continents sans exception.
Dans ce contexte des pays producteurs céréaliers ont fermé leur porte ou augmenté les restrictions à l’exportation pour satisfaire leur demande nationale en priorité et s’assurer une sécurité alimentaire.
Il faut noter que les projets soutenus par la Banque Mondiale dans les pays en développement dans les 15 dernières années ont largement délaissé le secteur agricole. Tout en finançant et recommandant fortement la libéralisation des filières agricoles alors encadrées par les états et cela d’une face peu accompagnée et non progressive, la Banque Mondiale a fragilisé l’accès à des ressources alimentaires de population déjà dans des situations précaires. Ils font un nième mea culpa en ce moment et promettent d’appuyer le développement des filières agricoles.

Une chose est certaine, les pays en situation de crise n’en sont malheureusement qu’au début et cela pourrait avoir un effet boule de neige, c'est-à-dire s’étendre à d’autres pays et également s’étaler sur plusieurs années. Leurs marges de manœuvre sont très limitées pour ne pas dire inexistante. Après il faut savoir qu’un certain nombre de pays ne souhaitent pas s’identifier comme étant en crise. La situation qu’on nous présente n’est pas encore celle qui existe réellement.
Notons simplement que la Programme Alimentaire Mondiale (PAM) des nations unis demande une aide internationale de 2 milliards de dollars US pour assurer un minimum calorique aux populations victimes de la crise alimentaire mondiale. Notons que la guerre en Irak a déjà couté plus 500 milliards de dollars US et que la crise financière des subprimes aux États-Unis vient de couter 1000 milliards de dollars US au niveau international. L’aide d’urgence alimentaire n’est qu’une réponse ponctuelle limitée et n’est évidemment pas une solution pour la résolution de la situation de crise de façon durable.
Notons qu’on sait depuis 1983 que la planète est en mesure de nourrir 10 milliards d’individus sans que cela ne compromette la durabilité des ressources. L’utilisation des OGM n’étaient pas énoncée dans la liste des orientations à promouvoir.
Les solutions et les risques sont donc connues! Et depuis un certain temps!

Je vous joins quelques liens pour des recherches plus approfondies. Et selon moi, toujours se poser la question : À qui profite le crime alimentaire?
Hypothèse très personnelle. La prochaine grande récolte de riz ne proviendra pas de l’Asie qui produit 90% du riz au monde et qui sera en décembre-janvier prochain. En cette année de jeu olympique chinois, c’est aux États-Unis qu’aura lieu la prochaine grande récolte, en septembre-octobre avec un excédant commercial de 3 à 4 millions de tonnes de riz…
Parallèlement le gouvernement étatsunien vient d’annoncer une augmentation de l’aide alimentaire de son pays. Disons que les producteurs céréaliers de ce pays n’ont pas de crainte à avoir cette année en ce qui concerne l’écoulement de leurs productions. Disons que le pays a de quoi négocier cette année sur le marché des influences politiques internationales. Mais bien sûr, je dois me tromper.

Le site de la FAO : http://www.fao.org/index_fr.htm
Le rapport conjoint de l’OCDE et de la FAO sur les perspectives agricoles pour les prochaines années : http://www.oecd.org/dataoecd/7/44/38896704.pdf
L’institut international de recherche sur le riz : http://www.irri.org/
Le CADTM : http://www.cadtm.org/spip.php?article3269
Oxfam international: http://www.oxfam.org/fr/
Article de Jean Ziegler (Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’alimentation) sur les biocarburants, Le Monde, 14 avril 2008 : http://www.lemonde.fr/sciences-et-environnement/article/2008/04/14/les-biocarburants-accuses-d-exacerber-la-crise-alimentaire_1034251_3244.html
Le même Ziegler dans le Monde Diplomatique, mars 2008 : http://www.monde-diplomatique.fr/2008/03/ZIEGLER/15658
Serge Halimi, le Monde Diplomatique, mars 2008 : http://www.monde-diplomatique.fr/2008/05/HALIMI/15859
Fonds monétaires internationales : http://www.imf.org/external/french/index.htm

lundi 31 mars 2008

Nina

Nina, tu me parles depuis ton siècle, depuis ta cause. Tu me parles dans ton intransigeance, tes révoltes, depuis la résiliation à te mettre au service de la cause et à ne pas fuir ton destin de femme noire jusqu’à ton talent de musicienne et de chanteuse.
J’aurai cherché à te connaître peut être. Mais où es tu aujourd’hui?

http://www.youtube.com/watch?v=5T3FXFnoTzE

http://www.youtube.com/watch?v=GUcXI2BIUOQ&feature=related

http://www.youtube.com/watch?v=mSasf8GBfV4&feature=related

http://www.youtube.com/watch?v=tAv1FDpdnmE&feature=related

http://www.youtube.com/watch?v=SEX19zLQezU

http://www.youtube.com/watch?v=ORSzfw8FE-o&NR=1

http://www.youtube.com/watch?v=SFWs5kWP-us&feature=related

jeudi 27 mars 2008

L'autre

Voilà un moment que des rencontres ont lieu au centre culturel et linguistique Jean Mermoz de Saint-Louis sur le thème de la rencontre et du dialogue interculturel. Je dois dire que les échanges ne suffisent pas à nourrir ma curiosité. Voilà certains questionnements qui continuent à me traverser l’esprit.

La rencontre avec l’autre nous permet d’exister.
Cela permet de décliner notre identité.
Mais pourquoi avons-nous besoin de décliner notre identité. Je viens de… je suis né à… j’ai étudié ceci … j’ai voyagé dans tel pays… je suis célibataire…J’ai 3 frères… Je travaille pour…
A quelle période intervient la conscience de l’autre dans la constitution de la personnalité de l’enfant? Je sais donc que l’autre n’est pas moi et est différent. Qu’est ce qui nous pousse ou nous attire dans l’échange avec l’autre?
De le connaître me paraît trop léger. De se comparer peut être.
En déclinant notre propre identité, notre passé, c’est une façon d’exprimer son désir de laisser une trace, de réagir à notre peur de notre propre mort.
C’est peut être une façon de se sentir en vie. De prouver qu’on a réellement vécu.

Il y a évidemment plusieurs types de rencontre, mais ces rencontres qu’on dit et que je suis le premier à dire chercher en travaillant/voyageant, ne seraient elles pas celles de la recherche d’un idéal jamais trouvé.
Il arrive qu’on préfère l’autre quand il nous conforte dans les idées que nous nous faisions de lui. Ils/elles sont comme-ci, comme-ça.
Ne courrons nous pas après des mythes réconfortants. Nous ne savons pas nous occuper de nos personnes âgées, mais eux au moins ils le font toujours/encore. Nous n’avons plus tant de forêts à protéger chez nous, pour cause nous avons nous même coupé les arbres, mais qu’il est bon d’aller secourir l’Amazonie. Je parle avec mon voisin, l’autre jour il m’a offert un pâté, après quoi plusieurs jours après je lui ai apporté quelques fruits pour sa famille. Notre rencontre, bien qu’incomplète, existe. J’existe à travers cette rencontre. Comment s’appelait mon voisin au fait à Montréal?
L’autre me fait grandir cela dit. Je n’avais pas conscience de ce que l’on pouvait ressentir en état de minorité visible. Je ne m’étais jamais vu à ce point comme un enfant d’un des systèmes impérialistes de ces derniers siècles. Mon éducation est-elle toujours impérialiste? Dans quelle mesure dois-je connaître l’autre avant, pour rentrer en contact avec lui? Suis-je en mesure de le connaître suffisamment à travers les médias que je côtoyais habituellement dans mon pays d’origine?

Que dois-je accepter pour rentrer en contact avec l’autre?
Dois-je m’être posé ces questions, sur mes réelles motivations à rentrer en contact avec l’autre, avant de le faire?
L’autre a-t-il les mêmes motivations? Certaines sont-elles incompatibles?
L’autre a-t-il les moyens de me dire ce qu’ils pensent dans notre rencontre? En a-t-il le droit? S’en donne-t-il le droit? Sait-il qui il est lui-même?
Et si sa conscience de lui-même provenait majoritairement de ce que lui projette l’autre de lui-même? Et si cet autre avait eu des intérêts très intéressés par le passé au point de lui projeter une image de lui-même qui était complètement fausse?

On dit : chaque langue qui meurt c’est une façon de percevoir le monde qui s’éteint. L’autre me permet de voir le monde sous d’autres angles, avec d’autres langues, qui véhiculent d’autres valeurs. Certaines m’attirent. D’autres ne m’attirent pas. Mais elles me permettent de mieux me définir encore. Pas de verbe « avoir » dans la langue nationale du Mali. Pas nécessaire de tuer les araignées. La grosse dans le coin de ma douche sera peut être celle qui mangera le moustique qui devait me donner le paludisme. Mon rapport à la nature est celui que ma société m’a enseigné. Je suis donc très déterminé. Certaines cultures sont-elles plus ouvertes vers les autres? de part leurs histoires, de part leurs situations géographiques?

Cette soif de l’autre peut elle être étanchée? Dans ce cas pouvons nous dire que nous avons guéri des autres, que l’on s’est guéri grâce à l’autre? L’autre est-il utilisé? Qu’est ce que je laisse réellement à l’autre? Est-ce que cela dépend de mes intentions d’avant rencontre?

L’autre me permet de me sentir différent mais me rappelle que je fais parti d’un tout. L’espèce humaine, dans sa complexité, dans ses différentes mais dans sa nécessité de se considérer un.

samedi 22 mars 2008

Petit secret dévoilé


Si je ne perse pas dans la chanson ou l’écriture, pourquoi ne pas essayer dans la cuisine? Je ne parle pas de la grande cuisine, celle qui provoque les oh! et les ah!, ni même celle qui fait rouler les yeux à l’extase, mais celle qu’on fait rapidement avec les ingrédients du lieu où l’on se trouve. Vous vous dites, « Pas encore un texte avec sa cuisine? » et je vous réponds : « Si, si et re-si!! ».

Aujourd’hui donc une petite recette, qui semble avoir fait quatre satisfaits hier soir chez moi, à moins que ce ne soit le vin qui accompagnait le plat… Laissez-moi croire qu’il s’agit du plat, « Ma lotte aux tomates », la bien nommée!

Tout commence, comme dit ma mère, par la recherche des bons ingrédients. Pour cela il vous faut (pour 4 personnes) :
Des tomates fraîches. Je dirai une dizaine. Si elles sont produites dans votre région vous gagnez pas mal de points, sinon, plus elles proviennent de loin et plus vous contribuez à la pollution de l’air. Évidemment si elles sont biologiques ce n’est pas mal, mais là-aussi il faut connaître la provenance. La majorité des produits biologiques du Québec proviennent des États-Unis. Ça revient donc à déshabiller Paul pour habiller Jacques. Incontestablement, les tomates gagnantes sont celles qui proviennent de votre jardin.

Ensuite, la lotte. Je choisi de la lotte puisque c’est ce que je trouve assez facilement à Saint-Louis, par contre si vous avez d’autres poissons à votre portée…. et bien ça ne marche pas puisque la recette s’appelle « Ma lotte aux tomates ». Donc je vous conseille d’acheter des lottes entières pêchées du jour (une lotte moyenne par personne est tout indiquée). La femme qui les vend prêt de chez moi, leur coupe la tête et les dépèce devant moi. Cela me permet de vérifier la fraicheur du poisson et de lui donner une apparence bien plus appétissante puisqu’une lotte mes ami(e)s, c’est pas joli joli comme poisson.

Il faudra également de la crème fraiche, de l’huile d’olives, du sel, du poivre, 3 feuilles de laurier et du thym. Malheureusement, seul le sel vient du Sénégal.
Pour les outils, une poêle, un chaudron et une spatule en bois suffiront.

Vous êtes maintenant armés pour faire « Ma lotte aux tomates » et donner l’impression à vos invités qu’un grand chef sommeille en vous.
Le temps ne préparation ne dépassera pas 15 minutes et le temps de cuisson approximativement la même chose.
Comme dit ma mère, l’importance c’est de trouver les bons produits!

Prêt? Allons-y!

Commençons donc par bien laver nos lottes. Ensuite, dans une poêle dont vous aurez recouvert le fond d’huile d’olives, ajouter les lottes, le poivre, le sel et le thym.
Une fois que la chaire des lottes donne l’impression d’être cuite, c'est-à-dire 5-6 minutes plus tard, déposez les dans le fond de votre chaudron. Il est important de laisser l’huile d’olives (ma nutritionniste ne serait certainement pas d’accord, mais je ne lui ai pas donné le lien de ce blog, alors pas de problème) rejoindre vos lottes dans le chaudron. Recouvrez les lottes d’eau (idéalement filtrée, ici à Saint-Louis, mais pas d’eau en bouteille, cela est bien trop polluant. Si on consomme 4,5 litres par jour et par personne, soit 3 bouteilles en plastique, fois 365 jours cela donne 1095 bouteilles pour une année, vous voyez qu’avant que la nature recycle tout cela, nous aurons eu le temps de tous y passer). Ajoutez vos trois feuilles de Laurier. Mettez le feu sous le chaudron. Vous pouvez mettre également le trio, sel-poivron-thym dans le chaudron.

En attendant, coupez les tomates en tranche. Idéalement de la même épaisseur, cela permettra une cuisson uniforme. Ensuite mettez votre poêle sur le feu (pas besoin de l’avoir lavée après les lottes). Déposer non pas un filet mais une corde d’huile d’olives et jetez-y vos tomates. Salez, poivrez, thymez (si ça existe) légèrement. Remuez régulièrement jusqu’à ce que les tomates commencent à se changer un peu en purée. Ensuite, réservez! J’ai toujours trouvé ce terme assez drôle, dans les livres de recettes de cuisine. Réservez! Ça me fait bizarre de l’écrire aujourd’hui. Cela signifie d’éteindre le feu tout simplement et de retirer la poêle. Donc une fois la poêle réservez, attendez que l’eau rajoutée dans le chaudron frémisse.

Lorsque l’eau du chaudron commencera à se manifester, il est temps de mettre la crème fraîche dans votre poêle pleine de tomates. Lorsque la crème et les tomates commenceront à frémir, prenez les lottes dans le chaudron et déposez les dans votre poêle. Il est temps que la table soit mise et que les bonnes baguettes que vous avez achetez soient déjà coupées en tranche parce que le plat est prêt à servir. Il vous suffit de déposer en premier lieu les lottes dans les assiettes de vos invités et de les recouvrir généreusement de cette sauce de tomates, crème fraîche et thym, si onctueuse.
Mes ami(e)s, bon appétit!!

samedi 15 mars 2008

Tiken Jah Fakoly


Comme j’avais volontairement laissé de côté l’artiste Tiken Jah Fakoly, puisqu’il mérite un texte à lui tout seul, je vous propose aujourd’hui ce petit chemin musical. Vous le connaissez aussi bien que moi si ce n’est mieux. Cela dit, les liens que je propose vous permettent de l’écouter facilement. (Je vous encourage toujours à acheter ses CD par la suite si sa musique vous plaît).
Donc. Le personnage est d’origine ivoirienne. Après des prises de positions politiques contre le président de son pays, il l’invite notamment à quitter le pouvoir à travers l’une de ses chansons (http://www.youtube.com/watch?v=g5z-xOhgd4w ). J’avoue qu’en fin de concert sa voix peut parfois laisser à désirer mais les paroles restent intactes et le message a le mérite d’être clair. L’artiste est assurément un sportif également. Ensuite, après s’être fait montrer la porte de sortie de son pays sinon quoi il aurait pu avoir quelques problèmes, il se questionne sur le lieu où il pourrait désormais vivre en paix, d’où la chanson, « Où veux tu que j’aille, pourquoi veux tu que j’m’en aille? ». (http://www.youtube.com/watch?v=zMqMYgPaHmg&feature=related ). Une fois installé à Bamako où il réside toujours d’ailleurs, il s’y marrie avec une … malienne comme de bien entendu. De là il sort quelques albums d’envergure internationale. Il dénonce avant tout la colonisation et le néocolonialisme. Cette chanson parlant en toile de fond du traité de Berlin de 1885 qui a vu les puissances coloniales se partager l’Afrique comme si le continent n’était pas habité. http://www.youtube.com/watch?v=EdkAaqmd260&feature=related
(l’ambiance de ce vidéo n’est pas très électrique, mais c’est pour que vous compreniez bien les paroles…). Il couvre les questions du néo colonialisme de la France, d’où le titre d’un grand album «Françafrique ». http://www.youtube.com/watch?v=MkCtDHJ6EAI Mais il n’oubli pas le tonton d’américa, d’où cette chanson, écrite d’ailleurs par l’un des anciens chanteurs du groupe Zebda en France. Un bijou.http://www.youtube.com/watch?v=C7OVAVgIKQc&feature=related
Cette chanson dénonçant les guerres occidentales est assez intéressante. La vidéo par contre n’est pas géniale. A écouter seulement je pense. « C’est le soldat qui meure, rarement monsieur le général » http://www.youtube.com/watch?v=Neu9kCYlxyU S’en suit ensuite une critique très intéressante de la coopération. Selon moi ces textes devraient être présentés à toute personne désirant s’investir dans cette voix.Ce titre « le balayeur », « Le balayeur balayé » « Arrivé comme un sauveur il est reparti comme un voleur » « Arrivé comme un héro il est reparti comme un zéro »…http://www.youtube.com/watch?v=OtKgTZnYZWs Le balayeur étant le coopérant, avec toutes ses intentions, bonnes, moins bonnes, conscientes et inconscientes…Son titre « On a tout compris » montre qu’il reste prêt de ses intentions premières, la critique de la sphère politique :http://www.youtube.com/watch?v=orzx3KxT7AQ
Ce texte réclame plus de Justice : http://www.youtube.com/watch?v=rcQMifwFXcA Dans son dernier album collé sur les problématiques contemporaines, il évoque les questions entourant l’émigration dite clandestine, les facilités des occidentaux à venir en Afrique alors que l’inverse n’est pas vrai, ensuite ceux et celles qui parlent de l’Afrique à travers la lecture de la section « Afrique » du Monde, de « La presse » et autres journaux peu au fait des réalités ou désirant peu en parler.Donc, « viens voir, viens voir, toi qui parle sans savoir, mon Afrique n’est pas ce qu’on te fait croire… » http://www.youtube.com/watch?v=k-roEHyGau4&feature=relatedhttp://www.youtube.com/watch?v=Cv69wCB0lCM&feature=relatedEt le titre très polémique : « Ouvrez les frontières ». Très beau vidéoclip d’ailleurs :http://www.youtube.com/watch?v=uwOV7w1jiWEPour finir un texte assez dur contre l’excision, une implication sociale qu’on retrouve assez souvent en Afrique de l’Ouest. A écouter c’est sûr! http://www.youtube.com/watch?v=PFvZm4L8Us8
Il chante également en anglais et en Dioula.
Voilà quelques chansons dans cette langue :
Chanson contre les mariages forcés http://www.youtube.com/watch?v=zwJ9kKBB9lE
http://www.youtube.com/watch?v=DVaZLl1Gw5E&feature=related
En fait il n’est pas facile d’en trouver en Dioula sur internet. VRAIMENT il faut acheter les CD.

Voilà c’était court mais ça donnera envi j’espère de l’écouter et de le réécouter. Malheureusement, après l’avoir vu au festival sur le Niger à Ségou au Mali, après l’avoir écouté au Stade Modibo Keita à Bamako ainsi qu’au Métropolis à Montréal, je ne risque pas de le voir ici. En fin d’année 2007 il fut désigné persona non grata par le gouvernement sénégalais. Sa maladie chronique l’avait poussé à demander quelques jours auparavant au président sénégalais de quitter le pouvoir. En ce moment l’artiste est impliqué dans la réconciliation de son pays la côté d’ivoire.
http://www.youtube.com/watch?v=nr6OhFwVm8g

vendredi 7 mars 2008

« Mais comment peut-on se dire humaniste sans être féministe? »

Voilà une phrase qu’une femme a porté à mes oreilles hier lors d’un évènement organisé à Saint-Louis dans le cadre de la semaine entourant la journée internationale des femmes, le 08 mars.
Je vous propose la lecture de quelques paragraphes d’un manuel scolaire qui nous rappelle que notre héritage de relations homme-femme très déséquilibrées est à la fois très lourd et que les quelques changements dans ce domaine sont très récents.
Il est à noter que les formes de domination des hommes sur les femmes sont plus visibles dans les sociétés dans lesquelles nous ne vivons pas. Cela ne signifie absolument pas qu’elles n’y existent pas.

« Extrait d’un manuel scolaire
d’économie familiale domestique
publié au Québec en 1960

FAITES EN SORTE QUE LE DÎNER SOIT PRÊT. Préparez les choses à l’avance, le soir précédent s’il le faut, afin qu’un délicieux repas l’attende à son retour du travail. C’est une façon de lui faire savoir que vous avez pensé à lui et vous souciez de ses besoins. La plupart des hommes ont faim lorsqu’ils rentrent à la maison et la perspective d’un bon repas (particulièrement leur plat favori) fait partie de la nécessaire chaleur d’un accueil.

SOYER PRÊTE. Prenez 15 minutes pour vous reposer afin d’être détendue lorsqu’il rentre. Retouchez votre maquillage, mettez un dans vos cheveux et soyez fraîche et avenante. Il a passé la journée en compagnie de gens surchargés de soucis et de travail. Soyez enjouée et un plus intéressantes que ces derniers. Sa dure journée a besoin d’être égayée et c’est un de vos besoins de faire en sorte qu’elle le soit.

ÉCOUTEZ-LE. Il se peut que vous ayez une douzaine de choses importantes à lui dire, mais son arrivée à la maison n’est pas le moment opportun. Laissez-le parler d’abord, souvenez-vous que ses sujets de conversation sont plus importants que les vôtres. Faites en sorte que la soirée lui appartienne.

NE L’ACCUEILLEZ PAS AVEC VOS PLAINTES ET VOS PROBLÈMES. Ne vous plaignez pas s’il est en retard à la maison pour le dîner ou même s’il reste dehors toute la nuit. Considérez cela comme mineur comparé à ce qu’il a pu endurer pendant la journée. Installez-le confortablement. Proposez-lui de se détendre dans une chaise confortable ou d’aller s’étendre dans la chambre à coucher. Préparez-lui une boisson fraîche ou chaude. Arranger l’oreiller et proposez-lui d’enlever ses chaussures. Parlez d’une voix douce, apaisante et plaisante. Ne lui posez pas de questions sur ce qu’il a fait et ne remettez jamais en cause son jugement ou son intégrité. Souvenez-vous qu’il est le maître du foyer et qu’en tant que tel, il exercera toujours sa volonté avec justice et honnêteté.

LORSQU’IL A FINI DE DÎNER, DÉBARRASSEZ LA TABLE ET FAÎTES RAPIDEMENT LA VAISSELLE. Si votre mari se propose de vous aider, déclinez son offre car il risquerait de se sentir obligé de la répéter par la suite et après une longue journée de labeur, il n’a nul besoin de travail supplémentaire. Encouragez votre mari à se livre à ses passe-temps favoris et à se consacrer à ses centres d’intérêts et montrez-vous intéressée sans toutefois donner l’impression d’empiéter sur son domaine. Si vous-même avez des petits passe-temps, faîtes en sorte de ne pas l’ennuyer en lui en parlant, car les centres d’intérêts de femmes sont souvent assez insignifiants comparés à ceux des hommes. »

Pour celles et CEUX que cette question de la domination masculine interpelle, je vous propose de lire notre ami Bourdieu qui l’a analysée avec la plus grande honnêteté possible, me semble-t-il. http://www.monde-diplomatique.fr/1998/08/BOURDIEU/10801

mardi 26 février 2008

D’la muse!

Sujet plus contemplatif.
Je me propose aujourd’hui de partager avec vous, grâce à « youtube », un peu de musique africaine. Je ne suis pas musicien, ça vous le savez, encore moins chanteur, mais j’aime à me laisser transporter par quelques bonnes musiques. Enfin, ce que je trouve être de la bonne musique. Sans plus tarder, voilà quelques groupes, que la plupart d’entre vous connaissent mais qu’il est bon d’écouter et de réécouter. (Je dois avouer ne pas être très au fait de la musique sénégalaise pour le moment, je suis dans la découverte, d’ailleurs si vous en connaissez, à part Youssoun N’dour, je suis preneur).

Honneur aux femmes!
Commençons par Rokia Traoré. Elle est malienne et vivrait dans le sud de la France. J’ai eu la chance de la voir à l’ancien Spectrum à Montréal.

http://www.youtube.com/watch?v=VrMHo6u5vQc

http://www.youtube.com/watch?v=KhTpPJeALYQ

Mamani Keita. Une voix indescriptible. Également malienne. Je l’ai manqué au centre culturel français à Bamako, aaaah! J’espère que vous aurez la chance de l’entendre.

http://www.youtube.com/watch?v=dQ23h4nyQKg

Habib Koité : Un malien très sympathique apparemment. J’ai pu le voir à deux reprises au festival sur le Niger à Ségou au Mali. Une très belle voix et un très bon joueur de guitare. A noter que son vieux balaphoniste est véritablement sidérant. On le voit sur la première vidéo…

http://www.youtube.com/watch?v=DAmxXizTKSY&feature=related

http://www.youtube.com/watch?v=c5ItD5MnfyU

Les « monstres » de l’Afrique :

Salif Keita, il n’est pas nécessaire de le présenter. Le premier morceau est avec Cesària Évora, la déesse aux pieds nus. Vu à deux reprises à Montréal et à Toronto. Il est toujours aussi énergique, un grand monsieur de la scène.

http://www.youtube.com/watch?v=UkUUaxjQCfI

http://www.youtube.com/watch?v=NdeedHX9fmI&feature=related

Ali Farka Touré. 2 Grammy Award. Quoi dire de plus? Écoutons.

http://www.youtube.com/watch?v=y5Nem-PNHLY

http://www.youtube.com/watch?v=dLoHVqmITGk&feature=related

Toumani Diabaté. Alors qu’Ali Farka Touré a remporté son premier Grammy Award avec Ry Cooder, il a remporté le second avec Toumani Diabaté. Le grand maître de la Cora. Il mari souvent son instrument mythique à d’autres non moins mythiques comme la harpe ou la sitar indienne. Il m’a été permis de l’écouter au festival sur le Niger au Mali.

http://www.youtube.com/watch?v=8luhdxS2KuM&feature=related

http://www.youtube.com/watch?v=yWvdsNix8lQ&NR=1

Boabad orchestra. Un des groupes mythique du Sénégal. Je vais essayer de les voir cette année.

http://www.youtube.com/watch?v=l0ySarXJs9o

http://www.youtube.com/watch?v=M8oYwng8w8c&feature=related

Baaba maal. Un autre groupe sénégalais mythique. Ils chantent en peul, une langue de la sous-région (comprenez qu’on retrouve les peuls dans pas moins de 7 pays africains. J’y reviendrai mais les occidentaux ont fait ce découpage « éclairé » de l’Afrique au traité de Berlin en 1885).

http://www.youtube.com/watch?v=csBbIwK09Rk

Tinariwen, les enfants du désert. Musique touareg très inspirante. Certains chanceux les ont vus au festival du bout du monde en Bretagne cette année…

http://www.youtube.com/watch?v=fzGSNomC5kk&feature=related

http://www.youtube.com/watch?v=72_C5OGO0i8&feature=related

Youssou N’dour, LE chanteur sénégalais par excellence. J’ai eu la chance de le voir en concert gratuit dans le vieux port de Montréal. Son duo avec Neneh Cherry a fait le tour du monde. Dans la première vidéo, écoutez cet instrument que l’on place sous le bras. C’est un instrument à percussion mais le musicien peut aussi contracter des cordes avec son bras et ainsi tendre la peau qui lui donne ces sonorités si particulières. Certainement l’un des instruments que je préfère écouter.

http://www.youtube.com/watch?v=k2Q4bc86yiI

http://www.youtube.com/watch?v=UbBSDE-Dywo&feature=related

Comme je ne peux pas vous parler de tout ce monde de musique que j’apprécie je vous reviendrai une autre fois avec d’autres artistes.
Après, je vous conseille d’acheter leurs CD!

samedi 23 février 2008

questionnements??

Ce n’est pas parce que je me déplace maintenant avec le titre de conseiller, après avoir été stagiaire, que je ne suis plus habité des questionnements qui m’accompagnaient par le passé. Et j’espère bien qu’ils continueront à me déstabiliser le plus longtemps possible.
Je n’ai pas de doute sur le fait que chacune et chacun d’entre nous vivons ces remises en questions ou réajustements et ces prises de recul. Je suis d’ailleurs ici, au Sénégal, pour décentrer mes perspectives et mettre mes certitudes en doute. Un doute salvateur, qui empêche de s’enfermer dans une culture, dans une éducation, dans un environnement et qui invite à l’effort de comprendre l’autre dans ses différences et d’envisager les ponts qui nous unissent. Après je sais bien qu’il existe d’autres façons de prendre du recul et aussi de se rapprocher des autres sans nécessairement quitter son propre environnement. Personnellement, je suis dans la première démarche en ce moment, ce qui n’exclu pas, et au contraire, que je décide de changer et de me stabiliser par la suite.
La différence est peut être que je me propose de partager avec vous ces questionnements, dans un premier temps, et peut être, plus tard, ce qui en est ressorti. J’ai bien conscience de l’aspect nombriliste de l’exercice, mais je veux me faire l’écho des réflexions qui habitent certaines personnes qui travaillent dans le domaine de la coopération, afin, peut être d’apporter de l’eau à votre moulin, des doutes créateurs aux vôtres. Mes questions seront volontairement naïves mais présenteront honnêtement mon cheminement, tout naïf qu’il était et qu’il l’est toujours.

Avant le départ du premier séjour voilà ce qui me passait par la tête :

Quelles sont les raisons profondes qui me motivent à m’invertir dans un tel projet?
Est-ce que le fait d’être un homme ne sera pas une difficulté supplémentaire pour travailler avec des groupes de femmes? (puisque je devais travailler avec des productrices d’échalotes, souvenez-vous)
Ne suis-je pas en train de prolonger une fuite commencée depuis plusieurs années?
Qu’est ce que je sacrifie en faisant le choix de poursuivre ce projet?
Serais-je à la hauteur des attentes? De qui?
Serais-je en mesure de transmettre mes réelles intentions et de favoriser un climat de confiance avec les personnes avec qui je vais vivre?

Dés les premiers pas en sol malien certaines questions m’étaient venues :

Qu’est ce qu’un jeune occidental vient chercher, honnêtement, dans une première expérience africaine?
Quelles sont les images que l’on peut avoir de l’Afrique, notamment à travers nos médias, de ce continent avant d’y avoir mis les pieds pour la première fois?
Pourquoi choisir la voie de la coopération pour cette première expérience?
Quel rôle joue la coopération internationale dans le grand théâtre de la mondialisation?
Quel est ma légitimité en tant qu’enfant de l’ancien empire français dans cette région du monde, à peine officiellement (au début des années 1960) libérée de la colonisation?
Quel part de l’héritage impérialiste européen dois-je prendre sur mes épaules?
Ne sommes-nous pas plus critique et exigeant lorsque nous travaillons dans la coopération envers le pays d’intervention qu’envers notre pays d’origine?
Est-ce que tout l’argent, du billet d’avion à l’hébergement en passant par la nourriture et les transports ne seraient pas mieux « investi » s’il était directement reversé aux collectivités locales?
Pourquoi est-ce que j’éprouve tant de répulsions envers des individus de mon propre pays, dans certaine situation?
L’embourgeoisement est-il inévitable lorsqu’augmente les responsabilités dans le domaine de la coopération?
Avoir un sous-sol riche est pétrole, en or ou en diamant n’est-il pas le plus grand risque pour un pays africain?
Pourquoi un virus contre le paludisme n’existe toujours pas?

Au cours du deuxième séjour :

N’est-ce pas nous que nous sauvons en premier lieu, si quelqu’un est sauvé dans le processus?
Dans quelle mesure les connaissances artisanales, musicales, traditionnelles que certains attribuent à l’Afrique ne continuent pas à renforcer une certaine image préconçue de l’Afrique?
N’est ce pas une nouvelle mode que ces séjours de 2-3-4 mois dans un pays en développement?
Certaines personnes ne contribuent-elles pas plus à creuser les distances et à renforcer les préjugés?
Qu’est ce qui compte, finalement dans ces échanges pratiquement à sens unique?
Comment des individus qui n’ont jamais vécu dans des familles nationales peuvent ressentir la vie de famille et les réalités du pays? Est-ce si utile cela dit?
Compte tenu des écarts importants tant économiques que culturels, un réel dialogue est-il envisageable? Qu’est ce qu’un réel dialogue?
A quel point ne mettons nous pas notre santé en jeu avec de telles immersions?
Comment faire valoir notre conviction dans l’importance des droits des femmes? Où en sommes nous d’ailleurs avec cette question dans nos pays occidentaux?
Quelles sont les responsabilités des élites et des populations?
Si je n’étais pas né là-bas mais ici, qui serais-je?
Qu’est ce qu’on appelle la culture mondiale?

En ce moment :

Travailler à l’amélioration de la commercialisation d’une céréale, le riz, qui n’est pas issue du continent mais qui a été apporté, contribue-t-il à nuire au développement des cultures traditionnellement africaines?
Ne sommes nous pas, pour certains dans l’idéalisation de l’Afrique? Est-ce que cela ne la dessert elle pas plus d’ailleurs?
Prenons nous suffisamment conscience qu’il y a plusieurs Afrique?
A partir de quand peut on s’objecter face à certaines pratiques locales, tant sociales que politiques? Comment le faire?
Quels sont les résultats de l’industrie de la coopération depuis ses débuts?
Le rôle du coopérant n’est il pas celui de l’agitateur public?
Que nous apprennent les manifestations qui ont lieu dans plusieurs pays africains contre « la vie chère »? (A Bobodioulaso encore hier au Burkina Faso)
Que peuvent nous apprendre les cohabitations religieuses au Sénégal?
Comment comprendre que les sénégalais soient si difficiles en terme de nourriture?
Est-ce que le sucre contenu dans le riz peut favoriser le diabète?
Le monde est-il prêt à accueillir les millions de réfugiés climatiques des prochaines années?

Ce que je vous propose pour rendre ce blog et ce texte un peu plus interactif, ce serait de m’envoyer sur mon adresse « yahoo » une de ces questions à laquelle vous aimeriez que je tente d’apporter quelques éléments de réflexion. Je vous invite également à joindre à ce message votre adresse postale, il se pourrait bien que les premières personnes à le faire reçoivent quelque chose par la suite…
Merci de vous prêtez au jeu.

L'organisation de la conférence islamique


Je vous transmets la présentation officielle du gouvernement sénégalais d’un évènement international qui aura lieu à Dakar dans les prochaines semaines.

« L'Organisation de la conférence islamique (OCI) est une Organisation internationale qui compte cinquante sept États décidés à rassembler leurs ressources, à unir leurs efforts et à parler d'une seule voix pour défendre leurs intérêts et assurer le progrès et le bien-être de leurs populations et de tous les musulmans, à travers le monde.
L'Organisation a vu le jour à Rabat, Royaume du Maroc, le 12 Rajab 1389 H, correspondant au 25 septembre 1969, à l'occasion de la première réunion des dirigeants du monde islamique, tenue dans la capitale marocaine suite à l'incendie criminel de la Mosquée d'Al-Aqsa, perpétré le 21 août 1969
L'Organisation de la conférence islamique se donne pour buts essentiels:
de promouvoir la solidarité entre états membres;
de prendre toute mesure pour aider à la paix et à la sécurité internationale fondée sur la justice;
de coordonner les efforts de sauvegarde des lieux saints et appuyer la lutte du peuple de Palestine et l'aider à récupérer ses droits et libérer son territoire.
Malgré son nom, cette organisation n'a rien de religieux. Ses buts sont politiques, culturels, économiques et sociaux. C'est ainsi que, d'une part, des États d'idéologie laïque comme, par exemple, l'Algérie, l'Irak, la Turquie ou la Syrie, y participent et que, de l'autre, certains États membres y sont représentés par des chrétiens. A contrario, plusieurs États comptant des centaines de millions de personnes de confession musulmane ne sont pas représentés au sein de l'OCI, comme l'Inde ou de la République Populaire de Chine.
La Conférence des Rois et des Chefs d'États et de Gouvernements - le Sommet islamique - se réunit tous les trois ans et la Conférence des Ministres des Affaires étrangères deux fois par an en sessions normales. »

Logistique

Mes intentions, avec ce blog, restent les même qu’au début de cette expérience sénégalaise : vous partager mon quotidien. C’est pourquoi je mets à votre lecture ce message de l’ambassade du Canada, diffusé ces derniers jours à l’attention des canadiens actuellement dans le pays. Cela fait parti de notre réalité.
Rien de bien inquiétant cela dit.

"Le 11e sommet de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) aura lieu à Dakar, Sénégal, les 13 et 14 mars 2008. Bien que l'État du Sénégal procède actuellement à l'élargissement et à la modernisation de certains axes routiers, les divers déplacements des délégations durant le sommet pourraient réduire considérablement la mobilité urbaine. Nous vous recommandons, ainsi qu'aux membres de votre famille, d'être vigilants dans la programmation de vos activités quotidiennes. Cet avis est aussi en vigueur au cours des jours précédant et suivant la conférence. Les activités entourant la conférence débutent le 5 mars, date à compter de laquelle près de cinq mille visiteurs et délégués sont attendus. Par ailleurs, l'Ambassade du Canada souligne la nécessité pour tous ses citoyens canadiens, partout au Sénégal, de prendre quelques mesures préventives au cours de cette période. Pour cela, il vous faudra:
1. Vous limiter aux sorties essentielles
2. Éviter les foules nombreuses et faire preuve de vigilance dans les lieux publics fréquentés 3. Gardez à portée de main des réserves de produits alimentaires, d'eau et de combustible de cuisine suffisantes pour une semaine, et prévoyez un éclairage d'urgence.
Si vous disposez de moyens de transport, assurez-vous qu'ils peuvent être utilisés en tout temps et dans le cas des véhicules personnels les réservoirs d'essence/diesel sont toujours à un niveau élevé."

Pour ma part je serai de retour à Saint-Louis pendant cette période, avec les producteurs de riz, bien loin de cet évènement d'envergure internationale. Et notons que nous sommes régulièrement avisés par l'ambassade. A ce propos j'ajoute le lien du ministère des affaires étrangères et du commerce international (tient, c'est le même qui fait les deux??).
http://www.voyage.gc.ca/dest/report-fr.asp?country=260000

dimanche 17 février 2008

Un pélican du Djoudj … ou un jet du Djoudj!


Il est vrai que le Parc du Djoudj situé à 80 kilomètres de la ville de Saint-Louis est mondialement connu. Il est considéré comme l’un des grands parcs ornithologiques au monde. En plus des quelques millions d’oiseaux qui y font escale, il est possible d’observer des chacals, des singes, des crocodiles, des pythons ou des varans. La saison dans laquelle nous sommes en ce moment est relativement fraîche pour le pays, j’en conviens, soit environ 24 degrés dans la journée. Je serai même le premier à recommander sa visite qui permet également d’observer les rizières et les périmètres irrigués pour la culture maraîchère.
La France, comme un bon nombre de pays occidentaux, coordonne ses activités de coopération internationale à travers une agence. On l’appelle Agence Française pour le Développement (AFD), comme on l’appelle Agence Canadienne de Développement Internationale (ACDI) au Canada.
Si j’avais pu être mis au courant un peu plus tôt, et si vous n’aviez rien eu à faire, et si vous m’aviez demandé de vous divertir un peu, je vous aurai convié à un grand théâtre de la coopération internationale. La pièce s’est jouée la semaine dernière, non loin de la ville de Saint-Louis. Les acteurs d’abord. Une délégation française, composée du président de l’AFD, accompagné de l’ambassadeur de France au Sénégal et de leurs conseillers. La trame. Ils sont en mission. Au Sénégal. Ils doivent rencontrer les producteurs de riz d’un village organisé en coopérative de production. Les producteurs exploitent quelques 200 hectares d’une terre difficilement irriguée. Bon comment pourraient-ils arriver… Mais oui, en jet privé, directement au petit aéroport de la ville de Saint-Louis. A la descente, quelques véhicules 4X4 les attendent, gyrophares en fête. Le cortège transperce la campagne pour enfin arrivé au lieu de rencontre. Les villageois attendent depuis plus d’1h30. Dans la salle de la coopérative, les chaises, par couleur, sont bien ordonnées. Les agents nationaux ont installée les cartes du casier d’irrigation, qui fut d’ailleurs nettoyé grossièrement et à la hâte, la journée même. Arrive la délégation, poignées de mains par ci, on parcourt les chiffres au mur par là, et hop, 12 minutes plus tard, la caravane s’affère et lève le camp. Chute. Il ne faut pas arriver trop tard au parc du Djoudj.

lundi 4 février 2008

Producteur de riz, pas facile. Productrice pas mieux!

Avec mon collègue mais néanmoins adversaire de tennis, nous rencontrons, dans le cadre de notre travail, les conseils d’administration des unions agricoles affiliées à la fédération que nous sommes venus appuyer. L’un des exercices que nous réalisons nous permet d’en apprendre un peu plus sur les conditions de travail du riz et plus particulièrement sur les revenus qui sont générés après une campagne. Comprenez qu’un producteur cultive en moyenne un hectare de terre et que son rendement moyen se situe autour de 5 tonnes à l’hectare. Le riz cultivé se vend sous forme de paddy, c'est-à-dire non encore décortiqué, 10000 francs CFA les 85 kilogrammes. Soit moins de 23 dollars canadiens, soit 15 euros environ. Le producteur réalisera des recettes de l’ordre de 600000 francs CFA soit 1363 dollars canadiens, soit 923 euros. Pour ce qui est des revenus, l’exercice est assez simple. Ils pourraient vendre la paille de riz mais ce n’est pas encore très répandu, bon nombres de producteurs la brûlent encore directement au champ. C’est lorsque l’on passe à l’examen des coûts engagés et du travail effectué que le calcul se corse. Dés le mois de juin, le producteur signe une entente avec la banque nationale qui finance les campagnes agricoles pour pouvoir acheter les semences et les engrais. Bien évidemment les banques sénégalaises n’étant pas plus amusantes que les autres chargent un taux d’intérêt de 10% annuellement. Le gouvernement sénégalais subventionne l’exercice et réduit ce taux à 6-7%, pour simplifier. Le producteur commence dont l’été par le travail de la terre qui se déroule en plusieurs étapes. Je reviendrai plus en détails une autre fois là-dessus. Il y a les semences à étendre, les engrais à appliquer et les différents suivis qui permettent une bonne irrigation. L’entretient des canaux principaux est à la responsabilité de l’union tandis que l’entretien des diguettes leur revient. Il y aura la chasse aux oiseaux granivores qui peuvent décimer toute la récolte en quelques heures et le suivi des éventuelles maladies. Arriveront le coupage du riz ainsi que le battage qui nécessité parfois d’employer des manœuvres. Les producteurs doivent ensuite payer les sacs et le transport vers le lieu d’entreposage, qui n’est souvent pas gratuit lui non-plus. Arrivera en fin de campagne la redevance d’eau à payer à l’union pour l’entretien et l’administration des canaux d’irrigation. Je pause 3, je retiens 2, j’additionne et je soustrais et j’arrive à la conclusion qu’il ne reste pas grand-chose quand il reste quelque chose. Bien évidemment le travail effectué par le producteur n’est souvent pas pris en compte. Les rendements ne sont pas assurés non plus, certaines récoltes produisent moins de 5 tonnes à l’hectare, dû aux intempéries ou à une qualité douteuse des semences. Les producteurs commenceront leur campagne autour de juin pour vendre en janvier. Bien évidemment ils n’ont pas trop le droit de tomber malade. Les membres de leur famille ne l’ont pas beaucoup plus. Sinon, le producteur devra utiliser des ressources qu’il destinait à sa production pour payer la visite chez le médecin et les médicaments, mettant en péril sa campagne de riz. Pour simplifier les choses, les cours du riz ne sont pas stables non plus, les grandes bourses internationales, que ne contrôlent évidemment pas les producteurs peuvent faire chuter les prix. Il arrive que cela obligera le producteur à vendre à perdre. Dans ce cas, il ne pourra pas rembourser la banque qui ne lui consentira pas de nouveau prêt. Alors il s’endettera au prêt de la famille pour remonter la pente, toujours plus glissante. Les femmes pour leur part, ne réduisent pas les activités familiales dont elles ont traditionnellement la responsabilité et ont des difficultés supplémentaires pour avoir accès à la terre.
Ces producteurs n’ont évidemment pas de salaire. Ils devront étaler les profits de leur campagne sur l’ensemble de l’année pour se nourrir et subvenir aux autres besoins de base. Alors s’ils arrivent à gagner 20000 francs CFA par mois de ce dur labeur soit 45 dollars canadiens, soit 30 euros, alors ils nous accueilleront avec le sourire lors de nos rencontres. S’ils n’ont rien gagné alors ces pères de familles vivant avec les lourdes responsabilités s’y rattachant alors ils ne nous accueilleront pas moins chaleureusement.
Sans ce travail et ces échanges, il ne nous est pas possible de réaliser l’ensemble des difficultés que rencontres ces gens. Les connaissant maintenant, nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas… et vous non plus!

Article de presse

DESCENTE DE LA DIC : Sept personnes arrêtées suite à un article sur un mariage homosexuel

La Division des investigations criminelles (Dic) a arrêté hier sept personnes suite à l’article du magazine people faisant état d’un mariage homosexuel à Dakar. Selon notre source, la plupart de ces individus, soupçonnés de s’adonner à la pratique homosexuelle interdite au Sénégal, ont été interpellés par les policiers dans une maison de rencontre qui pourrait faire office de maison close dans ce milieu. Cette maison, ajoute la source, se trouve dans la zone Patte d’Oie-Maristes, sans plus de précision. Dans sa dernière livraison, le magazine Icône publie un dossier sur l’homosexualité illustré de photos d’une cérémonie qui serait un mariage homosexuel célébré dans un restaurant de Petit Mbao. Après cette publication, le patron de ce journal, Mansour Dieng, a reçu des menaces de mort, selon un site d’information sénégalais.

Malick CISS, Le Soleil, 04 février 2008
http://www.lesoleil.sn/article.php3?id_article=33182

dimanche 27 janvier 2008

A votre appréciation!

Ce texte provient du journal « Télémaque Échos » d’une école de la ville de Saint-Louis au Sénégal. On le trouve en page 3 du numéro de ce début d’année et il semble que ce soit le produit d’une élève de 3ème (environ 15 ans si ma mémoire est bonne).

« Le Port de la blouse

Le port de la blouse est un remède pour les tenues indécentes à l’école car le déferlement sauvage des modes importées a atteint les profondeurs de notre pays et pire de nos établissements.
En observant attentivement les tenues grossièrement indécentes de nombreux jeunes élèves, on se croirait à une soirée dansante. Ainsi on note dans les établissements les dernières modes telles que le « jumbax-out », le body, le haut décolleté, le « boy jumps ». Qui doit-on accuser? Les médias? Les parents? L’école? Ou tous à la fois?
L’école lieu de quête du savoir d’apprentissage, en somme d’éducation ne devrait-elle filtrer et mieux surveiller l’accoutrement de ses élèves? Le règlement intérieur de beaucoup d’école interdit le port des habits indécents. Mais est-ce appliqué? L’école est devenue la vitrine de la mode, c’est là où se commentent les nouvelles tenues, c’est là où l’on cherche à savoir leur prix, leur lieu de vente.
Ce mimétisme incontrôlé, inconscient et indécent a des conséquences néfastes au sein des établissements. Comment un garçon peut-il garder son équilibre auprès d’une fille en culotte courte service (Viviane)? En jupe extra courte avec des fentes devant derrière (Beyonce)? En pantalon dangereusement serré laissant entrevoir un « string » la cambrure des reins ou le reste? Ne parlons pas des « bines bines » scandaleusement provocateurs. En somme, ces tenues désarçonnent les garçons et gênent les jeunes enseignants. Elles entraînent très souvent des incompréhensions qui peuvent aller jusqu’au renvoi de l’élève ou des scandales vite étouffés. Que devons-nous faire? Nous devons réagir ensemble et vite, parler aux enfants, leur apprendre à filtrer les modes et à les adaptés à nos valeurs de « teggine » et de « sutura » car, autant, l’obscurité est l’alliée des valeurs autant l’inconscience est la complice des forces sataniques qui oppriment. Nous devons ainsi généraliser le port obligatoire des tenues scolaires (blouses et ensembles) à l’image des écoles comme le lycée Ameth Fall, le lycée Kennedy ».

samedi 26 janvier 2008

« Seydou Nourou, que vois-tu dans ce tableau? »



« Bon et bien, c’est avant tout sur l’Homme et la nature. Sur le lien entre cette homme et cette femme et la terre, les arbres, les oiseaux. C’est sur l’harmonie entre tout ça. Tu sais Fabrice chaque personne peut y voir des choses différentes ».
« C’est juste. Mais toi tu y vois quoi? »
« Et bien, il y a un homme et une femme qui travaille la terre. L’homme, de ses mains laboure la terre et la femme la sème. Tu sais, à vrai dire, je me pose cette question à chaque fois que je viens dans cette salle de ce centre de formation à l’heure du repas. Et ce que j’y vois change en fonction de mon humeur. »
« Explique-moi »
« Et bien par exemple, si je suis fatigué alors je ressens la dureté du travail de cet homme penché qui laboure péniblement avec ses mains. Si je suis joyeux alors ça me donne envi d’aller dans mon champ. »

Et vous qu’est ce que vous y voyez?

C’est en participant, pendant 4 jours avec les leaders agricoles de la Fédération pour laquelle je travaille, à une formation sur la communication, que nous nous retrouvions dans cette salle à l’heure du repas. Seydou Nourou est l’un d’entre eux.

samedi 19 janvier 2008

Pour réussir ce plat, il vous faut…




Visualiser à l’avance ce que vous devez acheter. Vous prendrez l’argent nécessaire en conséquence. Lorsque vous achetez un poisson je vous recommande de le toucher pour regarder la couleur de ses branchies mais également pour vérifier que la chair ne soit pas trop raide, tout n’en étant pas trop molle. En effet, certaines vendeuses de poissons les battent avec un gourdin pour leur donner une apparence plus fraîche. Autant vous dire que le goût n’est pas le même après ce traitement. Donc anticipez que vous aurez à toucher le poisson. C’est pourquoi il est préférable d’avoir le montant prêt à être donné pour ne pas à avoir à fouiller dans votre poche et à ouvrir votre portefeuille avec ces mains pleines de poissons. Donc, prendre le montant adéquat. Ensuite, c’est parti. Vous prenez le pont direction le marché aux poissons tout en ouvrant bien l’œil. Vous trouverez peut être sur les étales un ingrédient auquel vous n’aviez pas pensé. Vous passez devant les vendeuses de salades. Elles sont très fraîches et les vendeuses, tout comme en occident, savent que les arroser de temps en temps donne une bonne impression aux acheteurs. Mais je sais également que si j’achète cette salade, je vais devoir la laver dans une cuvette avec de l’eau de javelle, la rincer quelques fois et la sécher avant de pouvoir la manger. Non. Pas aujourd’hui. Je passe devant la vendeuse de crevettes. La femme, ayant autour de 60 ans, est assise sur un petit banc en bois. Elle offre des petites crevettes ou des grosses avec quelques petits crabes en prime. On peut en avoir qui sont déjà décortiquées. Le prix est abordable bien qu’elles ne soient que deux à ma connaissance à en vendre sur ce marché, contrairement aux vendeuses de salades ou de poissons qui sont plus nombreuses et regroupées en plus. Je pense à ces soupes de crevettes que je me suis préparé dans un des quatre bols à soupe tonquinoise que j’ai apporté avec moi de Montréal. Je pense également à ces sandwichs de crevettes, … on me bouscule. Je sors de mes rêveries, on est quand même au marché. Les gens se bousculent et l’allée qui borde le marché est très mince. Je dois donc me faufiler et afficher l’assurance de celui qui sait où il s’en va. Je passe devant l’entrepôt qui sert de boucherie. Là aussi les bouchers travaillent au même endroit. On y trouve du mouton, de la chèvre et du bœuf. Avec ou sans os, le prix est différent. Mais aujourd’hui c’est un poisson que je cherche alors au prochain entrepôt. Il est 18h30, c’est l’heure à laquelle on est sûr de trouver des poissons frais du jour. Elles sont là. Rien qu’à l’entrée cinq ou six femmes présentent fièrement les prises familiales. Dorades, maquereaux, sardines, bar (appelé Capitaine ici), rougets, mulets, thon blanc et autant d’autres espèces dont je ne connais même pas le nom en français. La mer a été généreuse aujourd’hui. Alors je regarde, fais mine d’être de passage, d’être peu intéressé. Je cherche avant tout le poisson qui va me tomber dans l’œil. Je n’ai pas encore essayé le thon. Je le verrai bien en darne sur un papier aluminium sur mon barbecue de fortune. Je reviens à mes esprits, l’enfant à qui j’avais donné une pièce l’autre jour pour m’avoir aidé à trouver le bar que je cherchais me salue. Finalement je m’approche d’une femme assisse sur un seau retourné. Elle m’offre de petites dorades rouges qui auraient bien fait mon affaire si je n’avais pas eu l’intention d’essayer le thon. Dans un wolof parfais je lui demande « du thon », alors elle plonge les mains dans son grand panier en feuilles tressées. Non, je ne veux pas de Dorade, j’aimerai du thon s’il vous plaît. Elles les sorts, les uns après les autres, on passe à travers les dorades, à travers les sardines, les minutes s’écoulent, pour finalement arriver vers la fin de la besace dans le coin des maquereaux. Mais finalement, pas un seul thon. Je décide donc, culpabilisant d’avoir fait sortir tous ces poissons à cette dame, de lui prendre deux maquereaux qui semblent bien frais. Elle me les prépare, entendons par là qu’elle me les vide, enlève la tête, coupe les nageoires et la queue. Finalement, je lui donne le prix qu’elle me demandait avant qu’on négocie un peu, histoire de, pour le travail qu’elle a effectué en préparant mes deux thons. Non, mes deux maquereaux. Qui a dit qu’on ne pouvait pas changer d’avis? Après l’achat de deux concombres et quelques oignons me voilà de retour en direction de chez moi. L’atmosphère est bien différent, les gens rentrent pour le repas, les femmes ferment leurs étalages, la nuit tombe sur le pont que je prends dans l’autre sens. Je m’arrête quelques secondes pour observer le reflet de la lune sur le fleuve miroitant. Il me reste une petite pièce dans la poche. Si la femme qui demande l’aumône régulièrement sur ce pont, avec la tête entièrement recouverte est là, je lui donnerai cette pièce. On est vendredi quand même, journée de la grande prière musulmane. Et il est de coutume d’être généreux ce jour là. Elle n’est pas là, dommage.
Voilà donc mes amis, ce qu’il faut pour faire ce plat. Par contre, si vous en voulez la recette…venez la chercher.